M. P. Corrèze – Assassinat fille couteau, Deuil d’enfant, Traumatisme et Divorce – EMDR

Témoignage manuscrit reçu le 28 février 2005

Jean-Pierre,

Déjà pour votre travail, sachez que je vais bien.

Je vous ai rédigé, sans le relire, sur le ressenti, un témoignage.

J’espère que vos travaux seront reconnus à leur juste valeur, par les « incrédules » et autres qui en 2005 devraient comprendre que seul le résultat compte, et que ce qui serait illégal c’est de ne pas assister, aider les personnes en danger, car la souffrance peut être dangereuse à long ou court terme.

Des méthodes ancestrales dites marginales peuvent être efficaces, si elles sont appliquées avec rigueur et compétence. La médecine traditionnelle a peut-être encore à avancer, mais là où elle échoue parfois elle a du mal à accepter la réussite.

Chacun est libre de choisir sa méthode pour se soigner, guérir est la seule chose importante.

Beaucoup de chemin reste à faire, le bon sens manque aussi, le respect de la liberté est encore fragile sans le pays des Droits de l’Homme.

« La plus atroce offense que l’on peut faire à un homme, c’est de nier qu’il souffre. » Cesare Pavese

Lorsque le pire arrive, qu’une grande cicatrice ne se referme pas, que la souffrance est là, présente en permanence, elle guette, elle s’insinue partout. Comment vivre avec une épine plantée dans le cœur ?

Le 24 novembre 2002, ma fille S. a été assassinée de neuf coups de couteau (arme de guerre) par son compagnon et père de la petite Z., née le 5/07/02.

Après son acte, celui-ci est parti en cavale, laissant ma fille de 29 ans baigner dans une marre de sang. Le dernier coup étant fatal, elle est décédée sur une route de campagne, dans les bras de Y., un jeune homme passant et qui s’est arrêté croyant à un accident. C’est lui qui a prévenu les secours.

A deux heures du matin, un capitaine de gendarmerie est venu à mon domicile me prévenir de l’assassinat et vérifier que le bébé de cinq mois était bien sous ma garde, car le siège-bébé dans la voiture de ma fille aurait pu laisser penser qu’il avait aussi tué le bébé ou le rapter.

Le G.IG.N. a de suite mis en place des hommes de protection autour de ma maison (gilets pare-balles, fusils à pompe…) pour nous protéger car alors personne ne savait où était le tueur et quelles étaient ses motivations.

Il s’est rendu trois jours après, et a été dans un premier temps interné en psy et après examens, déclaré responsable et donc écroué en Maison d’Arrêt en attente des Assises.

J. n’avait pas reconnu sa fille à la naissance, donc Z. était orpheline. J’ai demandé et obtenu la tutelle. Mais au fond de sa cellule J. a reconnu Z. le 7 avril 2003 pour son dossier défense, donc de « père inconnu » elle est passée à « père assassin de sa maman. »

Elle a été enterrée de 2 décembre 2002, après autopsie, et refus de ses dernières volontés d’être incinérée, car c’était une « pièce à conviction » et devait rester « disponible » en cas de rapports ou autres judiciaires.

Je laisse de côté toutes les démarches administratives, juridiques, sociales et autres.

L’enquête judiciaire a pris fin en août 2004. Le procès en Assises a débuté le 24 novembre 2004. L’assassin a été condamné à vingt ans de prison.

Je laisse de côté aussi les jours de procès où tout est dit avec précision, une loupe se pose sur chaque mot, c’est une souffrance publique terrible, qui arrive deux ans après les faits. Il faut à nouveau replonger dans le drame, l’horreur, entendre le pire, et surtout avoir en face de soi l’assassin, qui en l’occurrence n’a même pas demandé PARDON à sa famille détruite, à ma famille détruite, à sa fille Z. et ses amis.

Cette épreuve, ce calvaire, ce chemin de croix laisse une amputation irréversible pour une maman. Déjà la logique n’est pas respectée, le mobil du crime, « la colère », les images sont gravées, indélébiles.

Je n’ai pas pu voir ma fille avant sa mise en bière, car après l’autopsie j’avais peur, et je ne savais pas (encore) si son visage était mutilé.

D’autre part pour que cela soit plus corsé, mon mari m’a annoncé avoir rencontré la femme de sa vie, après trente ans de mariage.

Le 7 janvier 2003, à peine un mois après les funérailles, nous étions devant le juge, qui était très étonné que l’on puisse laisser une maman meurtrie avec un bébé de cinq mois à s’occuper.

Mais je n’ai pas pu faire opposition, j’étais sonnée, robot en larmes, incapable de parler et puis que dire à ce père qui se sauvait devant l’incendie, il souffre très certainement, mais « zappe » le passé.

Divorce à l’amiable mais déplacé, car j’aurais voulu qu’il attende le procès, pour que nous fassions face ensemble et unis devant la justice et les hommes.

Voilà en quelques mots un résumé d’une histoire qu’on lit, qu’on voit à la télé, et un soir de novembre rentre chez vous en détruisant une vie que l’on avait choisie.

Les destins sont parfois heureux, parfois malheureux, on est tous en attente de savoir quand ils viendront frapper à la porte.

Z. a aujourd’hui deux ans et demi, nous avons essayé avec mes amis et ceux de ma fille de lui faire connaître ce que tous les enfants du monde vivent, l’amour, l’affection. C’est une petite fille vivante qui nous condamne au bonheur car son histoire dramatique et sordide ne doit pas l’empêcher d’être une ado, une femme.

Je ne peux pas mettre et ne ferai jamais une hiérarchie dans la souffrance. Dans la douleur on peut dire « j’ai mal de 1 à 10 ». La souffrance c’est « je suis mal », l’échelle n’est pas possible, la chose ne dépend pas du corps, mais de l’âme, de l’esprit, du moment…

J’ai rencontré M. Cauver par l’intermédiaire d’un ami de longue date. Lorsque je suis arrivée à son cabinet, je n’était pas stressée, j’avais confiance. J’ai juste reçu dans les narines un parfum subtil, vu des pendules partout. Cela m’a fait penser à Alice au pays des merveilles de Warrol, le lapin qui court avec sa montre, avec le recul je me dis que c’est vrai qu’il faut surveiller le temps, car parfois il s’arrête.

Je connaissais EMDR par le livre Guérir, car pendant tout ce temps de souffrance, j’ai lu, j’ai cherché Pourquoi ? Comment sortir de mon trou noir ? Je n’ai pas de religion, une philosophie de vie plutôt hindouiste, mais surtout je crois en l’être humain.

La renaissance est une image simple mais précise, et Jean-Pierre sait non seulement écouter mais il entend au-delà de la parole. Il sait avec compétence et pertinence où il doit aller avec vous, il n’est pas intrusif mais cherche seulement dans sa première démarche, qui est la discussion, avec respect, tolérance et rigueur, il vous demande de « crever l’abcès », de vous fixer précisément et sans détour sur des images, celles qui font mal, celles qui restent, celles que l’on ne peut regarder sans souffrir.

Les larmes coulent, le nez aussi, là c’est vraiment radical mais on le saura après, salvateur.

Le deuxième volet se passe dans la salle d’à côté, tout est dit, assise sur la chaise en face de lui, il parle, il rassure, mais il est déjà dans le vif du sujet (sans le dire), il sait que le travail va commencer, se concentre et voilà, c’est parti, tout est à faire.

Bien expliquer, avant la séance oculaire, est véritablement une montagne russe, des hauts, des bas, des respirations, des paroles, des images, le corps entier est sollicité « de la pointe des cheveux au bout des orteils », les séquences défilent, ça va vite, dans la tête ça boue, dans l’estomac ça gargouille, et on avance dans ce tunnel qui n’en finit pas, où est le bout ?

Les yeux suivent les doigts, pleurent, brûlent. L’impression sans cesse d’être « tirée par le haut », les images, toujours elles, et voilà, scanner du corps, respiration : c’est fini.

Qu’est-ce qui est fini ?

Dernière ligne droite décisive.
La parole, encore elle, mais les mots pèsent moins lourd, les images sont là, mais l’épine a été arrachée avec violence mais avec sûreté et au prix d’efforts à deux.

Tout redevient paisible, serein, une grande sagesse s’installe, et surprise reste là : la renaissance, que dire, que penser, que croire. Pourquoi avoir attendu si longtemps ?

Le hasard, le destin, et tout n’est plus pareil, mettre des mots sur des images, pouvoir regarder une photo (cachée) sans avoir peur et surtout pouvoir dire, parler et montrer ce visage à une petite fille, qui elle aussi veut savoir. Elle ne souffre pas encore, l’innocence la protège, et maintenant la confiance de mamy. Les nuits noires qui ne sont plus blanches.

M. Cauver appelle à l’humilité, au partage, met en place un cache solide.

Après plus d’un mois, rien n’est plus pareil, la vie a pris un sens, la réalité du quotidien n’est plus fragile.

Ma fille écrivait beaucoup, des cahiers entiers, j’ai hier pris le dernier, sa dernière phrase écrite deux jours avant sa mort : « La seule chose qui brille en mourant, c’est une étoile. »

Voilà, je peux regarder le ciel, elle brille là-haut chaque jour.

Il n’y a pas de mots pour exprimer un tel ressenti, merci c’est petit, trop petit, pour présenter à Jean-Pierre une éternelle et sincère reconnaissance pour ses compétences, son travail et sa discrétion, l’humilité alors qu’il vient de « sauver une âme. »

Ce témoignage a la valeur du résultat de cette séance. Il est fait sans complaisance, mais dans un esprit de vérité pour que d’autres puissent bénéficier de cette main tendue.

Jean-Pierre, maintenant, je peux vivre, j’ai une destinée, des projets, des envies et Z. sera là pour me le redire.

Je sais que vous consacrez beaucoup de temps, beaucoup de travail pour Renaissance.

Il y aura toujours des sceptiques, des mauvaises langues, des imbéciles à qui la vie et l’expérience n’ont rien appris. Ceux qui contournent la montagne au lieu de la franchir.

Et il y a les autres, ceux qui peuvent dire que personne n’est protégé de la souffrance.

Que nous sommes tous égaux, et chacun trouve sa solution, la foi, le suicide, et que sais-je encore ?

L’essentiel est le résultat, et là, je peux affirmer sans le moindre doute que M. Cauver maîtrise parfaitement « la mission » qu’il s’est imposée, que j’ignore ses objectifs, mais que son travail est effectif, et durable.

Je vous autorise à utiliser ce témoignage si besoin est, de convaincre les patients, le monde médical ou autre.
M.P.

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